Le SLAPIS: un système d’alèrte précoce capable de réduire les risques d’inondation de la Sirba au Niger

La région sahélienne a été exposée récemment à une augmentation drastique des inondations. L'augmentation des débits fluviaux est principalement causée par l'augmentation des événements pluviométriques extrêmes[1], les changements d'utilisation des terres et la dégradation des sols[2] qui ont conduit à l'érosion régressive et à l'intensification du réseau de drainage de surface[3].

Au cours de la dernière décennie, l'augmentation, en termes de fréquence et d'intensité[4], des inondations ainsi que la croissance démographique ont causé des dommages importants et sans précédent aux populations[5]. Ces événements catastrophiques ont incité les gouvernements à solliciter le soutien de la communauté internationale pour développer des Systèmes d'Alerte Précoce (SAP) pouvant aider les communautés vulnérables.

La Sirba, fleuve transfrontalier entre le Burkina Faso et le Niger, est le principal affluent du moyen bassin du fleuve Niger et est l'une des principales causes des inondations dans la région. Le SLAPIS (Système Local d'Alerte Précoce pour les Inondations de la Sirba) a été mis en œuvre comme système pilote basé sur des produits et méthodologies existants pour être un système opérationnel et fiable qui pourrait être reproduit sur des bassins de petite et grande échelle.

SLAPIS, dont est disonibile la brochure, est un système intégré qui vise à promouvoir la prise de décision et les changements de comportement de l'approche réactive à l'approche proactive à différents niveaux, des communautés locales à l'administration centrale, pour la réduction du risque d'inondation dans les municipalités du tronçon nigérien de la rivière Sirba et plus en aval du fleuve Niger, y compris Niamey, capitale du Niger.

Le système a été conçu sur la base des besoins, capacités et technologies existants et appropriés au contexte local. SLAPIS est géré par la Direction de l'Hydrologie du Niger (DH) et a été produit par une collaboration multidisciplinaire, par le Polytechnique de Turin, le CNR Institut de BioEconomie (IBE) et par les Directions Nationales de la Météorologie et de l'Hydrologie (DMN et DH) du Niger, au sein du projet ANADIA2.0.

ANADIA 2.0 est un projet financé par l'Agence italienne pour la Coopération au Développement, qui contribue au développement d'une agriculture durable adaptée au changement climatique et moins vulnérable aux événements extrêmes pour soutenir la sécurité alimentaire au Niger. L'objectif spécifique du projet est d'étendre l'approche testée par ANADIA dans une deuxième région particulièrement touchée par les inondations, telle que la région de Dosso, en consolidant l'approche et en renforçant la collaboration entre les différents niveaux administratifs.

La philosophie de SLAPIS est de démontrer qu'il est possible pour les institutions et les communautés locales de mettre en œuvre un système simple basé sur les compétences et les outils existants qui utilise de manière proactive les mesures et les prévisions hydrologiques et hydrauliques pour réduire les risques d'inondation.

Le système est basé sur l'intégration des observations locales et des prévisions météorologiques et hydrologiques, à travers une plateforme d'information sur les risques, un mécanisme intégré d'information et de communication, la cartographie des zones inondables, des plans locaux de réduction des risques d'inondation et des actions de sensibilisation et de formation ciblées[6].

La mise en œuvre de SLAPIS a montré qu'il est possible de réaliser un transfert de technologie en intégrant l'état de l'art dans le domaine hydrologique et hydraulique et les résultats scientifiques dans le schéma de prise de décision adopté dans une zone rurale sahélienne et peut être reproduit dans n'importe quel contexte, même s'il est caractérisé par des lacunes de connaissances et structurelles.

SLAPIS couvre le tronçon nigérien de la rivière Sirba à travers la cartographie des zones alluviales, des stations de mesure hydrométrique et des modèles hydrologiques intégrés, des plans d'adaptation pour les localités concernées et une plateforme d'information sur la situation hydrologique fonctionnant en temps réel à l'adresse Web: www.slapis-niger.org.

SLAPIS a été développé sur les quatre composantes de base des systèmes d'alerte précoce basés sur la population[7] qui sont:

  1. Connaissance des risques

La connaissance du risque repose sur l'identification de quatre niveaux de vigilance et la construction de scénarios de risque qui y sont liés: vert (situation normale), jaune (crue fréquente), orange (inondation grave) et rouge (inondation catastrophique). Des niveaux d'alerte ont été identifiés grâce à la combinaison de l'approche non stationnaire de la théorie des valeurs extrêmes et de l'identification des impacts sur la vie humaine afin de quantifier l'effet du changement climatique en cours et de se connecter aux réglementations et modes opératoires en vigueur au Niger. Le modèle numérique hydraulique, créé avec le logiciel HEC-RAS, a été utilisé pour définir les zones d'inondation pour chaque scénario et le temps de propagation des vagues de crue. Le modèle hydraulique est basé sur la géométrie d'un modèle numérique de terrain mis en œuvre via des levés topographiques GPS et a été calibré avec des mesures de niveau et de débit effectuées dans le lit de la rivière[8].

  1. Services de surveillance et d'alerte

Les mesures et prévisions de débit dérivent en temps réel des deux stations hydrométriques automatiques installées sur le cours de Sirba et des prévisions de débit issues des modèles hydrologiques. Les prévisions hydrologiques adoptées proviennent des modèles GloFAS[9]  et Hype issus de la collaboration avec le Centre Commun de Recherche de la Commission européenne (CCR) et le Service Météorologique et Hydrologique Suédois (SMHI). Cinq echelles hydrométriques colorées ont été installées dans les villages prioritaires pour accroître la sensibilisation de la population. L'application Web SLAPIS a été développée selon les plus recentes normes d'interopérabilité et l'intégration de différents logiciels pour l'interface (GUI), la gestion des processus et des bases de données (PostgreSQL / PostGIS) et les produits d'interopérabilité des données via le catalogue open source (CKAN).

  1. Diffusion et communication

Le système de diffusion et de communication a été intégré au système national d'alerte conformément aux rôles et responsabilités des différentes institutions impliquées. Dès que le débit dépasse une seuil de surveillance, la plateforme génère un bulletin envoyé par la Direction de l'hydrologie (DH) aux autorités nationales et locales compétentes, selon les canaux et les formats convenus (email, téléphone, radio, sms, WhatsApp) selon à une approche descendante. Dans le même temps, les informations provenant des observateurs du village remontent suivant l'approche participative ascendante.

  1. Capacité de réponse

Le renforcement de la capacité de réponse suit la phase de définition des risques, matérialisée dans un atlas des zones inondables, et dans l'identification des éléments à risque, à travers des mesures de terrain et des images aériennes de haute précision réalisées au moyen d'un drone[10]. Les communautés locales ont participé activement à la définition des plans de réduction des risques d'inondation à travers une analyse participative des communautés locales pour la définition des mesures d'adaptation et d'atténuation à mettre en œuvre en fonction de chaque scénario de risque[11].

[1] Bigi et al 2018, https://doi.org/10.3390/cli6030073.

[2] Aich et al. 2015, https://doi.org/10.3390/w7062796.

[3] Descroix et al. 2018, https://doi.org/10.3390/w10060748.

[4] Tamagnone et al. 2019, https://doi.org/10.3390/w11010156.

[5] Fiorillo et al. 2018, https://doi.org/10.3390/cli6030059.

[6] Tarchiani et al. 2020, https://doi.org/10.3390/su12051802

[7] UNISDR, Developing early warning systems: a checklist, United Nations International Strategy for Disaster Reduction, Geneva, Switzerland, 2006.

[8] Massazza et al. 2019, https://doi.org/10.3390/w11051018.

[9] Passerotti et al. 2020, https://doi.org/10.3390/w12030620

[10] Belcore et al. 2019, https://doi.org/10.5194/isprs-archives-XLII-2-W13-207-2019.

[11] Tiepolo et al. 2019, https://doi.org/10.3390/su11154003.

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